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Interview exclusive

Suite de la carrière de l'homme aux 4 titres mondiaux et aux 37 Grands Prix

Torsten Hallman (2/2)

Q : Avez-vous roulé aux Etats-Unis ?

R : Oui. Husqvarna voulait se faire connaître là-bas. L’usine a donc décidé de m’y envoyer en pensant que c’était une bonne idée. Je me suis dit que cela serait une bonne opportunité pour se rendre aux Etats-Unis. J’ai reçu l’accord de l’usine 3 semaines avant le décollage. J’avais déjà voyagé en avion, mais jamais aussi loin et l’aéroport de Stockholm devait faire 1/10è de celui de Los Angeles ! J’étais un peu perdu, quand Edison Dye, l’importateur Husqvarna aux Etats-Unis, n’était pas au rendez-vous. Il me dit que j’ai un jour d’avance ! L’usine n’avait pas pensé au décalage horaire ! Je prends un avion pour San Diego mais il ne peut atterrir à cause du brouillard. Après quelques jours de repos, il était temps de faire mes débuts en course sur le sol américain.

Au moment de quitter la Suède, je ne savais pas quelles épreuves j’allais disputer, mais certainement plus que la « Dirt Digger » car la SVEMO (Fédération Suédoise) m’avait autorisé à m’engager n’importe où je le souhaitais. Nous sommes donc allés au nord de la Californie pour disputer une course à Corregeanville. C’était la 1è fois que je voyais un désert et ça m’a beaucoup fasciné. Je me sentais comme dans un autre monde !

La pluie commença à tomber fort quand nous nous dirigeâmes vers le départ. Parpleu ! Je croyais que la Californie était gorgée de soleil et je n’avais emmené que quelques tee-shirts pour rouler !! Nous étions environ 200 à 250 sur la ligne de départ, quand ma moto n’a pas voulu démarrer au 1er coup de kick. J’étais bon dernier ! Mince, comment allais-je faire de la publicité pour Husqvarna et moi-même ! Qu’importe ! J’ai remonté tous les pilotes sauf un après quelques tours. Déjà je pouvais voir les traces du leader, mais j’ai mis un bon moment avant de me trouver derrière ce pilote BSA, qui était Dick Mann !! Mon but était de le suivre puis de le dépasser dans les 3 derniers tours. Finalement j’ai changé d’idée, j’ai roulé le plus vite que j’ai pu, je l’ai dépassé et j’ai gagné avec une avance confortable ! Beaucoup de personnes étaient impressionnées mais personne n’avaient fait attention à ma moto ni à moi-même.

J’ai roulé au « Dirt Digger GP », qui était la plus grande course pour moi lors de cette tournée. Je me suis dit que je devais faire aussi bien qu’à Corregeanville. J’ai gagné les deux catégories 250 et 500. C’est cette épreuve qui m’a fait connaître aux Etats-Unis. Personne ne croyait que l’on pouvait rouler aussi vite sur une moto en motocross.

A la fin de mon séjour, j’avais couru 9 courses et gagné les 23 manches auxquelles j’avais participé !

Rencontres américaines : James Stewart, Raquel Welch et Dean Martin


Q : Comment était l’ambiance derrière le rideau de fer ?

R : Mes voyages en Union Soviétique ont toujours été très fascinants ! Je me souviens que tous les étrangers qui devaient courir à Moscou étaient accueillis à la frontière où nous devions rencontrer 4 membres du moto club. Les problèmes commençaient aux douanes où cela prenaient des heures et des heures pour accorder notre visa, déclarer l’argent que nous avions dans chaque monnaie et quelles affaires vous ameniez. Ils voulaient tout savoir sur la moto : le n° du moteur, des cadres, le nombre de pièces de rechange. Il arrivait que certains d’entre nous oubliaient de déclarer de l’argent dans une monnaie, car lors de nos déplacements, nous avions plusieurs ! Et bien, ils n’hésitaient pas à rester 1 ou 2 heures de plus pour retrouver la trace de cet argent !

Q : Quels étaient vos circuits préférés ?

R : Imola, Pernes les Fontaine et Sabadell.

Q : Quel est votre plus belle course ou souvenir ?

R : J’ai reçu un fusil Husqvarna de la part de l’usine comme cadeau pour l’importation aux Etats-Unis des motos de la marque. Ils me l’ont offert quand je suis rentré de mon voyage en 1966.

Q : Quel titre mondial fut le plus difficile à décrocher ?

R : Le premier a été le plus difficile et le plus nerveux.

Q : Quel était votre sentiment d’être sélectionné pour le Motocross des Nations ?

R : Fier !

Q : Quel est votre meilleur souvenir lors du Motocross des Nations ?

R : Aucun. Je n’y ai jamais eu de chance !!

Q : Vous avez roulé dans le stade d’Helsinki, commet était-ce ?

R : Il y avait un grand stade au centre d’Helsinki utilisé d’ordinaire pour les épreuves d’athlétisme et parfois d’équitation. Ils y ont dessiné un beau circuit à l’intérieur qui débordait même sur l’extérieur. Il y avait quelques buttes d’un côté du stade. Je pense que ce fut la première course en stade jamais organisée.

Q : Que pensez-vous de l’évolution du motocross ?

R : J’aime regarder les courses mais je préférerais que les Grands Prix aient lieu sur des pistes naturelles comme avant. De nos jours, il y a trop d’ornières, certaines très profondes. La nature des terrains est souvent trop souple quand le circuit est artificiel.

Q : Comment expliquez-vous qu’il n’y a plus de Suédois, Champions du Monde de motocross ?

R : Cela demande beaucoup de sacrifices d’être un top pilote et on dirait que personne ne veuille travailler dur et rouler.

Torsten Hallman, fier du travail accompli et de ses trophées


Q : Vous êtes également reconnu pour votre carrière dans les affaires, pouvez-vous nous en dire quelques mots ?

R : Après les glorieuses années du démarrage, beaucoup de nouveaux concurrents sont arrivés sur le marché de l’équipement en motocross. Des sociétés qui avaient connu notre développement sont arrivées avec leurs idées. Nous avons commencé par l’importation de pantalons de cuir à l’ancienne. Puis les américains sont devenus plus rapides en piste et plus importants dans le milieu. Ils ont voulu leur propre look, leurs propres équipements, leur propre identité. Hallman Racing a continué à se développer pendant cette période et a introduit sur le marché des produits innovants notamment la « Protection Collection ».

A part le motocross, je suis devenu le distributeur exclusif en Suède pour Yamaha de leurs motos, cyclomoteurs, motoneiges et moteurs hors-bord, après le fantastique travail de développement que j’avais réalisé pour le programme de la Yamaha YZ et du système de suspension Monocross.

Parallèlement j’étais l’importateur exclusif des motos KTM, des lunettes, VTT et vêtements de ski Scott, des casques Bell et Giro etc…et même concessionnaire Volvo dans la banlieue de Stockholm. Dans les années 90 j’étais impliqué dans une quinzaine de sociétés. Pour les amateurs de motocross, je suis également reconnu pour avoir développer avec Sten Lundin la Yamaha HL500 4 temps pilotée par Bengt Aberg en 1976 et 1977.

Q : Préférez-vous le football ou le hockey sur glace ?

R : Je suis les deux sports et quand j’étais jeune je les pratiquais tous les deux.

Q : Avez-vous vu la finale de la Coupe du Monde 1958 Suède-Brésil ?

R : A l’époque j’avais 16 ans et je jouais dans une équipe de football. La meilleure de la région ! Et bien sûr, j’ai vu cette finale, mais à laTV !

Q : Quels étaient vos passions pendant votre carrière et après ?

R : Pendant ma carrière je n’avais pas de temps pour faire autre chose que du motocross. Maintenant j’ai du temps pour jouer au golf et regarder d’autres sports et bien sur aller voir quelques Grands Prix et des supercross aux Etats-Unis chaque année. Tout récemment, je suis allé voir le Monster Energy Million Dollar Race à Las Vegas !

Photos : archives T.Hallman avec son aimable autorisation.